La Villa Cavrois : un bijou d’architecture d’avant-garde

La villa Cavrois et son miroir d'eau.
Dominique JULIEN
La villa Cavrois et son miroir d'eau.

La Villa Cavrois à Croix, près de Lille (Nord) est ouverte au public depuis juin 2015 après quinze ans de rénovation. Classé monument historique en 1990, grâce à l’action d’une association de passionnés, le bijou architectural de Robert Mallet-Stevens est une merveille du courant moderniste. Commandée par le richissime industriel Paul Cavrois en 1929 à l’architecte, ce « château » moderne montre dans chaque détail toute l’ambition du projet dont le cahier des charges se résume ainsi : « air, lumière, travail, sports, hygiène, confort et économie ».

La villa Cavrois et son miroir d'eau.
La villa Cavrois et son miroir d’eau.

En 1929, le couple Cavrois, Lucie et Paul a sept enfants, et il est de bon ton, pour la haute-bourgeoisie de l’époque, d’habiter des demeures de type régional et de préférence éloignées des usines. Paul Cavrois a acquis le terrain en 1923 et depuis, a déjà étudié un projet néo-régionaliste, qui ne l’a pas convaincu. Lorsqu’il rencontre Robert Mallet-Stevens en 1925, pendant l’exposition des Arts décoratifs de 1925, il est intéressé par le travail de cet architecte et visite avec son épouse la rue Mallet-Stevens, à Paris, que l’architecte vient tout juste d’achever. L’architecte propose alors au couple un projet de bâtisse au cadre de vie « sain, confortable et moderne ». Paul et Lucie Cavrois lui confie le projet avec la condition expresse de respecter le budget défini. En 1932, l’aînée des filles Cavrois s’y marie, inaugurant les lieux.

Avec une façade de 60 mètres de long, 2800 m² de plancher, et ses deux ailes symétriques, la villa Cavrois est héritière de la tradition des résidences aristocratiques du XVIIe siècle. D’abord, le jardin, devant la demeure, présente une piste circulaire, pratique pour ne pas avoir manoeuvrer l’automobile. Tout est dit : pratique. Chaque choix pour la réalisation de la maison est conduit par un besoin pratique, une volonté de joindre l’utile à l’esthétique. Ainsi, Mallet-Stevens fera des choix ultra minimalistes d’ornement, utilisant les matériaux plutôt que les objets pour habiter l’espace. Ainsi, Mallet-Stevens réalise tout le décor, défendant le concept d’oeuvre totale. Ainsi, en face de la porte d’entrée,  des « boîtes à lumière » encadrent une porte noire, inspirées de décors de cinéma que l’architecte a réalisé en 1924. Ce double-battant ouvre sur pièce centrale qui donne de l’autre côté de la maison, sur la terrasse et le jardin. Cette grande pièce lumineuse fait office de jardin d’hiver avec sur un de ses côtés, un salon avec une cheminée en marbre de Sienne encastrée dans le mur, de l’autre côté, un salon qui encadrent la porte qui mène à la salle à manger des parents… Selon Robert Mallet-Stevens, le décor domestique « doit refléter la psychologie de ceux qui y évoluent » ; pour la villa Cavrois, celui d’une famille bourgeoise.

La salle à manger des enfants.
La salle à manger des enfants.

 

Une architecture au service de l’esthétique et du confort

Conduit par une volonté de dépouillement des volumes, Mallet-Stevens recourt aux matériaux tels que le verre, le métal et l’acier ainsi qu’aux techniques industrielles. L’architecte utilise la construction elle-même pour exprimer la modernité : larges baies vitrées, dépouillement des volumes, multiplication des toits terrasses, équipement de pointe avec chauffage central, téléphonie, heure électrique centrale avec pendules synchronisées dans toutes les pièces, ascenseur… tout est pensé pour le confort des hôtes. Quant aux espaces de réception, Mallet-Stevens choisit des matériaux tels que le marbre ou des bois précieux, pour conférer raffinement et simplicité à l’intérieur mais aussi la prospérité de l’industriel. En revanche, dans pièces comme la cuisine et les salles de bain, hygiène et fonctionnalités dominent l’ensemble. Des placards intégrés dans les murs, un monte-plat pour desservir les terrasses, des sanitaires dans toutes les chambres, la maison Cavrois est pensée espace par espace, en fonction des occupants de lieux. Ainsi, l’étage des enfants comportent des chambres plus petites que les suite du rez-de-chaussée, réservées aux aînés de la famille, ainsi qu’une chambre pour la gouvernante. Au même étage, des salles d’études et un espace de jeu permet une surveillance aisée. Cette dernière salle, conçue comme une petite scène, peut également accueillir des spectacles. Chaque pièce est un bijou à elle seule et vaut le détour. La villa Cavrois est un témoignage d’avant-garde exceptionnel. Le visiteur touche du doigt et des yeux la raison d’être du design, au service de l’art de vivre, au-delà de la villa elle-même, tout la vie semble avoir été pensée également pour une vie saine, avec par exemple, la mini-ferme et son jardin potager (aujourd’hui disparus) qui permettaient à la famille de vivre de ses produits.

Le boudoir attenant à une chambre.
Le boudoir attenant à une chambre.
La cuisine avec son sol et ses meubles d'origine.
La cuisine avec son sol et ses meubles d’origine.

Mais si, aujourd’hui, le public peut voir ce trésor, c’est grâce au travail d’une association de passionnés qui a oeuvré pendant 25 ans pour classer le monument et favoriser son rachat par l’état, le sauvant d’une destruction certaine au profit d’un programme immobilier. La villa, telle que le visiteur la voit aujourd’hui, est le fruit d’une restauration qui a duré 15 ans, qui a demandé moult études et la mobilisation de nombreux experts. Une histoire singulière qui permet d’en apprendre beaucoup sur l’architecture et l’avant-garde.

http://villacavrois.blogspot.fr/2001/12/lentreprise-textile-de-paul-cavrois.html

http://www.villa-cavrois.fr/Explorer/La-villa-Cavrois/L-histoire-de-la-villa-Cavrois

décalaj

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *