Une œuvre complexe que celle de Robert Combas. Au premier regard, l’oeil ne voit que formes et couleurs. Il faut faire un effort, prendre du recul pour lire l’œuvre et l’apprécier toute entière.
D’ailleurs, ses tableaux, colorés pour l’essentiel, donne un ton de joie. Pourtant, lorsque l’oeil s’attarde à comprendre le fond, le dessin, elle est tout sauf joyeuse. Elle est complexe, elle parle de l’absurdité du monde, de la guerre, de fraternité, de la paix. Des sujets graves que l’artiste semble vouloir dédramatiser. Des textes accompagnent ses tableaux, avec des fautes de syntaxes, ou d’orthographe, ou de grammaire, des fautes qui n’en sont pas évidemment : l’artiste joue avec les mots et avec les couleurs. Sur la vidéo de 52 minutes qui est projetée, ses amis qualifient le travail de Robert Combas d’intellectuel alors que les lecteurs non avertis pensent volontiers que l’artiste est un joyeux trublion. Non, l’œuvre de Combas se dévoile à celui qui la fouille, qui la cherche. Il ne s’agit pas de mise en abîme ni de métaphore, plutôt d’imbrications. Combas raconte des histoires avec ses pinceaux. Plusieurs histoires qui s’entremêlent.
Mouvement de la figuration libre
Combas a 54 ans au moment de la vidéo. Elle a été réalisée à l’occasion d’une rétrospective présentée au musée d’art contemporain de Lyon. Son directeur dit « l’œuvre de Combas est la seule à ma connaissance à mêler textes et images ». Je ne suis évidemment pas d’accord vu que j’ai vu le roman graphique de Charlotte Salomon. D’ailleurs, une certaine « naïvité » dans le trait leur est commune. Je pense que les deux artistes partage une espèce d’urgence à peindre et à créer. Michel Onfray analyse pour sa part son ami « comme un médium lui-même qui ressentirait les ondes du monde qu’il retranscrirait ». Combas lui-même parle « d’écriture automatique de l’artiste » au détour d’une phrase qu’il ne finit pas… mais souvent Combas ne finit pas ses phrases, entame plusieurs conversations à la fois, s’arrête de peindre, prend sa guitare, écrit musiques ou textes, puis reprend ses pinceaux. Combas est infatigable, semble infatigable. Il crée sans cesse. Le domaine où il semble le moins à l’aise est l’expression orale. Toute son énergie est ailleurs. Dans sa musique, il écrit et joue du rock avec son groupe sétois, les Sans pattes. Combas est prolixe, généreux. Il est l’un des artistes contemporains les plus vendus au monde. Le voir opérer est saisissant. D’abord, il s’immerge dans une ambiance musicale, comme s’il avait besoin d’être en transe. Comme s’il avait besoin de ne plus penser pour pouvoir s’exprimer. Il applique de la couleur au gré de coups de pinceaux, parfois même sans regarder sa toile, puis, revient, ajoute ça et là des couleurs comme des notes à une partition. Puis, il fait ce qu’il appelle les contours. Il applique un contour noir épais ou blanc épais selon la circonstance. Il se revendique du mouvement de la figuration libre. C’est assez déroutant, vu que libre est le dernier mot qui me vient à l’esprit pour qualifier son oeuvre. Je dirais plus volontiers emberlificotée, cernée, emprisonnée presque. Parfois les personnages paraissent comme pliés pour entrer « dans le cadre ». En tout cas, Combas ne laisse pas indifférent.
A voir au musée du Touquet jusqu’au 22 mai 2016.
Merci pour ces précisions.